Depuis le coup d’État militaire de février 2021, la junte a enfoncé le pays dans une catastrophe tant sur le plan humanitaire que sur celui des droits humains.
Confrontée à l’opposition de la population générale et de groupes armés favorables à la démocratie, l’armée peine à garder le contrôle du pays.
Les abus généralisés et systématiques de la junte à l’encontre de la population – parmi lesquels des arrestations arbitraires, des actes de torture, des meurtres extrajudiciaires et des attaques sans discrimination contre les civils – constituent des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.
Après trois ans de conflit, les raids aériens menés par l’armée et les combats au sol ont entraîné un véritable exode.
De grandes offensives menées par les groupes armés ethniques et les PDF ( Forces de Défense du Peuple) forcent les militaires birmans à combattre sur plusieurs fronts.
L’armée est vraiment en difficulté, plus qu’elle ne l’a jamais été depuis sa création.
Elle se bat actuellement pour sa survie.
Elle a perdu le contrôle de ses frontières, car même les points sous son contrôle, le sont de façon très relative. C’est, également, une perte énorme de revenus pour la junte, et potentiellement aussi, à terme, une perte de soutien politique des pays voisins.
Par ailleurs, la junte militaire birmane peine à recruter et intensifie ses efforts de conscription obligatoire.
Des milliers de jeunes sont contraints de rejoindre les rangs de l’armée malgré les lourdes conséquences humanitaires et sociales.
En février, le régime a introduit un service militaire obligatoire de deux ans pour les hommes âgés de 18 à 35 ans et les femmes âgées de 18 à 27 ans.
À l’exception des personnes possédant certaines compétences techniques comme les médecins et les ingénieurs, les hommes de plus de 35 ans étaient exemptés de la loi de conscription nationale. Cependant, ayant subi des défaites militaires consécutives dans les états ethniques, le régime a décidé de forcer les hommes plus âgés à l’aider à se défendre.
Le régime militaire recrute ainsi des hommes de plus de 35 ans pour former des milices civiles dans tout le pays.
Cette conscription forcée provoque un exode massif des jeunes.
L’absence des jeunes sur le marché du travail, ne fait qu’aggraver les mauvaises perspectives socioéconomiques du pays, en proie aux économies illicites: la Birmanie est devenu un « épicentre mondial » de la production de méthamphétamine et d’opium, parallèlement à une expansion rapide des activités de cyber malveillance, en particulier dans les zones frontalières, où l’effondrement de l’état de droit est manifeste.
Par ailleurs, on voit que la perte de territoire de la junte, qui contrôle désormais moins de 30% du pays de façon stable, s’est traduite par une quantité de bombardements aériens croissante.
Mais si l’armée est en danger, elle n’est pas tombée pour autant.
Ainsi, la situation humanitaire en Birmanie se détériore gravement, contraignant des millions de personnes à quitter leurs foyers.
D’après le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (UNOCHA), environ 3,3 millions de personnes sont actuellement déplacées à l’intérieur du pays en raison du conflit armé qui perdure.
À cette crise s’ajoute le fléau des inondations récentes, qui a affecté près de 400 000 personnes supplémentaires, essentiellement dans l’état Karenni. Ces événements climatiques extrêmes, aggravés par la dégradation de l’environnement, viennent exacerber une situation déjà désespérée.
« Partout en Birmanie, les gens luttent pour survivre », a alerté Christina Powell, la responsable des affaires humanitaires des Nations Unies en Birmanie. Elle a souligné l’urgence d’une aide humanitaire massive pour répondre aux besoins de plus de 18,6 millions de personnes.
Les besoins sont immenses : nourriture, eau potable, abris, soins médicaux, protection des civils… Les organisations humanitaires peinent à atteindre les populations les plus vulnérables, notamment celles réfugiées dans des zones reculées ou contrôlées par les groupes armés.
Face à l’ampleur de la crise, les responsables onusiens ont rencontré le vice-ministre des Affaires étrangères du régime militaire birman. Les discussions ont porté sur l’accès humanitaire et les conditions de travail des employés des Nations Unies. Si les autorités ont assuré leur coopération, les organisations humanitaires restent prudentes et appellent à des mesures concrètes sur le terrain pour améliorer la situation de la population.
En Birmanie, tout particulièrement dans les zones de conflits armés, l’obstruction à l’aide humanitaire par la junte est manifeste et viole gravement le Droit Humanitaire International.
Le challenge est de canaliser l’aide humanitaire par le biais des groupes de la Société Civile, plutôt que par les autorités de la junte, étant donné les antécédents de l’armée en matière de corruption et de la mauvaise utilisation des fonds et du matériel d’assistance.
L’efficacité de l’aide dépend de l’engagement de partenaires locaux indépendants et impartiaux qui disposent des réseaux et de l’expérience nécessaire pour naviguer dans un environnement difficile.
On ne dira jamais assez combien la Birmanie est un pays qui ne mérite pas tant de chaos.
La Birmanie est encore et toujours un pays qui agonise dans l’indifférence générale.