La Birmanie, également connue sous le nom de Myanmar, est un pays du Sud Est asiatique avec une histoire riche et complexe, façonnée par une diversité ethnique remarquable.
Près de 135 groupes ethniques différents coexistent dans ce pays. Parmi les plus importants se trouvent les Birmans ou Bamars, les Shans, les Katchins, les Karens, les Chins, et bien sûr les Mons.
Nichée entre l’Inde, le Bangladesh, la Thaïlande, la Chine et le Laos, la Birmanie a été le théâtre de civilisations anciennes et de migrations multiples.
Au fil des siècles, la région a vu l’émergence de grands empires et de royaumes, dont les influences ont laissé une empreinte indélébile sur sa culture et sur son peuple.
Parmi les premières civilisations à prospérer dans la région, les Pyus, les Môns et les Arakanais ont apporté leur propre contribution à l’histoire et à l’identité birmane.
Les Môns ont connu des périodes d’indépendance et de domination par d’autres groupes ethniques, y compris les Birmans. Historiquement, les Môns ont formé plusieurs royaumes et Cités – Etats puissants.
Ils ont souvent été impliqués dans des échanges culturels avec d’autres communautés de la région, contribuant ainsi à la diversité culturelle de la Birmanie.
Ils ont joué un rôle crucial dans les domaines de l’art, de la littérature et de la religion.
Ils ont introduit le bouddhisme Theravada qui est profondément enraciné dans la culture Môn et furent les premiers à connaître l’influence de l’Inde.
Ainsi, les Môns ont une histoire et une culture riches qui remontent à des millénaires et sont une des plus anciennes ethnies de Birmanie.
Ils seraient de l’ordre de 900 000 à 2 400 000, dont certains en Thaïlande.
Ils vivent principalement dans la région sud le long de la frontière thaïe, autour de la ville de Mawlamyine qui est considérée comme le cœur de la culture Môn.
Le riz et l’hévéa sont les plus importants produits agricoles. On y cultive aussi des durians et des mangues.
On exporte, à partir de Mawlamyine, du thé, du tabac, du caoutchouc, du sel et des produits en bambou.
Dans la société birmane, les Môns ont conservé leur propre langue, ainsi que des traditions et des coutumes distinctes:
Architecture:
Les Mons ont une tradition artistique et architecturale, caractérisée par des motifs et des styles uniques. Leur architecture traditionnelle, notamment les temples et les pagodes, présente souvent des éléments décoratifs élaborés et des sculptures détaillées.
Musique et danse:
La musique et la danse sont réputées pour leur rythme lent et leur élégance. Ils ont des danses traditionnelles qui sont souvent exécutées lors de festivals et de cérémonies religieuses, accompagnées d’instruments de musique traditionnels comme la flûte, le tambour et le gong.
Littérature:
Les Mons ont une riche tradition littéraire, avec une histoire qui remonte à des siècles. Leur littérature comprend des épopées, des poèmes, des contes et des textes religieux. Le « Yama Zatdaw », un poème narratif sur les enseignements du Bouddha, est l’une des œuvres littéraires les plus célèbres des Mons.
Langue et écriture:
La langue Môn est une langue Môn-Khmer, avec sa propre écriture. Bien que son utilisation ait diminué au fil du temps, elle reste un élément important de l’identité culturelle des Mons et est toujours utilisée dans certaines communautés pour préserver leur patrimoine culturel.
Artisanat:
Les Mons sont réputés pour leurs compétences artisanales, notamment dans la poterie, la sculpture sur bois, la fabrication de textiles et la fabrication d’objets en bronze. Leurs produits artisanaux sont appréciés pour leur qualité et leur beauté esthétique.
Les couleurs dominantes chez les Môns sont le rouge et le blanc qui signifient courage et pureté.
Le rouge est notamment la couleur de leur tenue traditionnelle, encore appelée longyi.
Malgré les défis historiques et contemporains auxquels ils ont été confrontés, les Môns continuent de préserver leur identité culturelle et jouent un rôle important dans la mosaïque ethnique de la Birmanie.
Il y a tout lieu pour les Môns d’être fiers d’une différence qui s’enracine dans une longue histoire.
Histoire contemporaine:
Pour l’histoire, retenons que la France, au temps où la Compagnie des Indes Orientales s’efforçait d’étendre son influence en Extrême Orient, fut l’un des alliés des Môns contre les Birmans. En 1751, après la grande révolte des Môns, un certain sieur de Bruno s’employa à mettre au service des rebelles une modeste armada navale. La tentative échoua, marquant la fin de l’épisode français en Birmanie.
La Basse Birmanie fut conquise par le Royaume Uni en 1824 au cours de la première guerre anglo-birmane.
Les Môns aidèrent les Britanniques contre une promesse d’autonomie après la défaite de la Birmanie.
Des centaines de milliers de Môns émigrés au Siam revinrent dans leur patrie quand elle passa sous contrôle britannique. Cependant, les promesses de restauration d’un royaume Môn ne furent pas honorées.
En 1947, au moment de l’indépendance, les Môns réclamèrent leur auto-détermination par rapport à l’Union Socialiste Birmane, mais le premier ministre U Nu refusa de leur accorder des droits nationaux séparés.
L’armée birmane intervint alors dans les zones revendiquées par les séparatistes Mons, ce qui provoqua une guerre civile.
Les séparatistes môns formèrent le Front Populaire Môn, remplacé ensuite par le Nouveau Parti de l’Etat Môn (NMSP: New Mon State Party) en 1962.
L’emblème du NMSP est un drapeau rouge frappé d’une étoile et de la silhouette dorée de l’oie sacrée ou hamsa, oiseau mythique du peuple Môn.
A partir de 1949, les collines orientales de l’Etat (ainsi qu’une partie de la division de Thanintharyi) passèrent sous le contrôle de sa branche militaire, le Front National de Libération Môn (MNLF).
Le MNLF combattait le gouvernement, mais aussi les Karens pour le contrôle du commerce frontalier avec la Thaïlande.
En 1974, la création de l’état Môn par le gouvernement birman est une réponse au long combat qu’ont mené les Môns pour leurs droits civiques
En ce qui concerne la représentation politique des Môns, ils ont des organisations et des partis politiques qui cherchent à défendre leurs intérêts.
Le NMSP est l’une de ces organisations.
Les Môns se battent pour la reconnaissance et la préservation de leur identité ethnique et de leurs traditions face aux tentatives d’assimilation et d’oppression.
Ils militent en faveur d’une plus grande autonomie régionale.
Ils luttent pour des réformes démocratiques et pour la fin du régime militaire
Comme tous les autres regroupements politiques des ethnies minoritaires de Birmanie, le parti môn a été la victime de sécessions internes, avec des affrontements violents et meurtriers entre factions.
Au début des années 90, le NMSP sera de nouveau réunifié sous la houlette de Nai Nong La.
En 1995, le NMSP signe un premier accord de cessez le feu avec le pouvoir birman, rompu bien plus tard, mais qui lui a permis jusqu’à aujourd’hui de contrôler ces zones jouxtant la frontière thaïe, indépendantes de facto.
Mais, en dépit du nouveau cessez-le- feu signé en 2012, rien n’est réglé.
Les Môns ne sont pas satisfaits du dialogue politique engagé avec le pouvoir.
A la racine du différend, et entre autres désaccords, la guérilla môn n’entend pas respecter la constitution établie sous le régime militaire en 2008.
Constitution qui renforce les pouvoirs des militaires et interdit à toute personne ayant des attaches étrangères à devenir chef de l’état, visant ainsi ASSK
Après le coup d’État de février 2021 qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi, la Birmanie est aux prises avec un climat d’instabilité et de guerre civile.
Des Môns de la société civile ont participé aux manifestations de résistance à travers le pays, mais le NMSP n’a pas pour autant dénoncé le cessez le feu, ce qui a permis à l’état Môn de bénéficier d’une certaine tranquillité même si les PDF ( forces populaires de défense) aidées par l’armée Karen menaient régulièrement des actions sur le territoire.
Le 31 janvier 2024, des Mons ont signé une déclaration de position commune avec des organismes alliés ( Karenni, Karen et le NUG entre autres), engagés dans la lutte révolutionnaire pour l’anéantissement de la dictature militaire et l’établissement d’une union démocratique fédérale.
Ces Môns ont levé une armée et créé les structures nécessaires à la mise en œuvre de leurs plans.
Depuis mars 2024, les combats se sont donc intensifiés dans la région.
L’armée birmane réagit selon son habitude en bombardant les villages de ses avions ou bateaux de guerre et utilise des armes lourdes contre la population civile.
Le territoire môn plus ou moins épargné jusqu’alors connait à son tour son lot de drames et de personnes déplacées internes qu’il va falloir apprendre à gérer.
Certains Mons essaient de fuir vers la Thaïlande en quête de sécurité et de protection, surtout depuis la mise en application de la loi sur la conscription ( enrôlement forcé par la junte des jeunes, filles et garçons) en mars 2024.
Les Môns ne reçoivent pratiquement aucune aide extérieure et la situation pourrait vite devenir aussi dramatique qu’ailleurs dans le pays.
Mais, ils participent à l’offensive quasi généralisée contre la junte militaire et crée un front supplémentaire.
La seule issue résiste dans l’espoir que la communauté internationale entende, enfin, le cri de désespoir du peuple birman et soit plus déterminée à prendre les mesures qui permettraient la fin de cette dictature militaire.